Après la signature, le 26 mars 2024 de la feuille de route pour la construction d’une centrale nucléaire, la société d’Etat Russe, Rosatom, et le ministère de l’Énergie, des mines et des carrières du Burkina ont scellé une coopération dans plusieurs domaines, visant à développer des technologies nucléaires. Ces mémorandums incluant des aspects comme l’enseignement, la formation du personnel pour les besoins de l’industrie énergétique nucléaire et les secteurs connexes ont été paraphés le mercredi 5 juin 2024 à Saint-Pétersbourg, en marge du Forum économique international.

C’est donc un pas supplémentaire dans la consolidation du processus de construction d’une centrale nucléaire au Burkina qui vient d’être franchi. En effet, mise en route en octobre 2023 par la signature d’un mémorandum d’entente sur la coopération dans le domaine de l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, la coopération entre la société d’Etat Rosatom et le Burkina s’est davantage ancrée en fin mars 2024 par la signature de la feuille de route.

« Cette feuille de route comporte des points majeurs, notamment la signature de trois mémorandums d’entente. Le premier porte sur le volet formation ; il s’agira de pouvoir disposer d’une masse critique de citoyens burkinabè formés dans les grandes universités russes sur des spécialités nucléaires et connexes. Dès septembre, nous pourrons avoir la première cohorte qui va se rendre dans les universités, pour pouvoir se former. C’est donc un point important de cette feuille de route. Le deuxième mémorandum va porter sur l’opinion publique, en conformité avec les recommandations de l’AEIA (Agence internationale de l’énergie atomique). En effet, pour la mise en place d’une centrale nucléaire, on recommande que l’opinion soit sensibilisée et qu’on fasse la communication sur l’activité nucléaire. Ce mémorandum va donc permettre d’aller vers une communication à large public sur la mise en place de cette centrale. Le troisième mémorandum va porter sur l’infrastructure nucléaire. Il va consister, à travers ce mémorandum, à fixer les fondamentaux pour l’évaluation et le développement de l’activité nucléaire au Burkina », avait, à l’issue dudit acte à Sotchi, situé le ministre de l’énergie, des mines et des carrières, Yacouba Zabré Gouba.

<p class="note" data-mc-autonum="Note: « >Lire aussi : Centrale nucléaire : “Nous pensons pouvoir démarrer le processus de construction, au plus tard en 2025”(ministre en charge de l’énergie, Yacouba Zabré Gouba)

Deux mois après cette étape, la signature sus-référée des trois mémorandums consacre donc une avancée vers l’opérationnalisation de cette technologie, sur laquelle de nombreux citoyens burkinabè fondent l’espoir face aux caprices à répétitions de l’énergie et dans un contexte où elle reste encore un luxe pour de nombreuses populations (en 2022, le taux d’électrification urbain était de 86,96%, comparé au 5,49% en milieu rural, selon le ministre en charge de l’énergie, à l’occasion d’un atelier qu’il a présidé le mardi, 19 mars 2024 à Ouagadougou).

« Les mémorandums prévoient des mesures spécifiques pour renforcer les ressources humaines pour l’industrie nucléaire au Burkina Faso. Des mémorandums ont été conclus sur l’éducation et la formation du personnel dans le domaine de l’énergie nucléaire ; sur l’évaluation et le développement de l’infrastructure nucléaire ; ainsi que sur les questions liées à la formation d’une opinion publique positive concernant l’énergie nucléaire. Les documents définissent les conditions-cadres pour l’interaction dans ces domaines dans l’intérêt du développement du programme national pour l’utilisation pacifique de l’énergie atomique. En particulier, des mesures spécifiques sont envisagées pour renforcer les ressources humaines pour l’industrie nucléaire au Burkina Faso. Des efforts seront déployés pour développer l’interaction entre les établissements d’enseignement spécialisés, notamment par l’organisation de programmes éducatifs communs de courte durée, la formation des enseignants, le développement de la littérature pédagogique et scientifique et les échanges d’étudiants », renseigne davantage le staff de la société d’Etat Rosatom, contacté à cet effet.

Le ministre Yacouba Zabré Gouba (à gauche) et le directeur général Alexeï Likhachev posant après le paraphe.

Toujours selon les détails donnés par cette source du géant du nucléaire, les parties entendent également déterminer les besoins actuels en matière de développement d’infrastructures nucléaires du Burkina, et les travaux seront réalisés conformément aux approches et recommandations de l’AIEA, ainsi qu’aux meilleures pratiques de la société d’État Rosatom. « Le document relatif à la coopération sur les questions d’opinion publique positive implique la mise en œuvre d’activités visant à accroître la sensibilisation du public aux avantages de la technologie nucléaire et aux applications non énergétiques de l’énergie atomique (en particulier en médecine et en agriculture) », a-t-il poursuivi.

Dans une conférence presse qu’il a animée le 26 mars, sur le bilan du Forum international sur l’énergie nucléaire 2024, le premier directeur général adjoint en charge du développement de l’entreprise et des affaires internationales de Rosatom, Kirill Komarov, a insisté sur l’importance pour les pays africains de faire recours au nucléaire et la nécessité pour les populations d’être imprégnées de la question. « L’énergie nucléaire n’est pas dépendante de la météo, du vent, du soleil. L’Afrique a besoin de projets nucléaires. Tous les pays du monde passent par le même processus ; au début, les gens ont toujours peur et c’est normal. Mais l’approche de Rosatom consiste à pouvoir donner des informations justes, honnêtes aux populations. Les règles de sécurité sont strictes. (…). Tous les risques liés à l’exploitation d’une centrale nucléaire sont pris en compte dans l’étape de la prospection (les études de faisabilité tiennent compte du contexte, y compris sécuritaire, d’éventuels accidents, des intempéries, etc.). Nous misons sur la formation des ressources humaines. Ce sont environ 5 000 étudiants africains qui sont actuellement en formation dans les universités russes à travers des segments du nucléaire. Le nucléaire, ce n’est pas une boîte noire qui sera exportée en Afrique. Au Burkina, ce sont des Burkinabè qui vont être formés pour gérer la centrale », a assuré le premier directeur général adjoint en charge du développement de l’entreprise et des affaires internationales de Rosatom, Kirill Komarov.

La délégation burkinabè, avec au premier plan, l’ambassadeur du Burkina en Russie, Aristide Ludovic Tapsoba (2è à partir de la droite), suivi à sa droite par le ministre Yacouba Zabré Gouba et le ministre en charge des transports, Roland Somda.

<p class="note" data-mc-autonum="Note: « >Lire aussi : Burkina/Energie nucléaire : « Dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, l’Afrique doit sauter les étapes. Nous sommes en retard », pousse Zéphirin Diabré

Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net